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EN BREF : rappel du droit de retrait du salarié - art L 4131-1 du code du travail

Le 27 mars 2020

FICHE PRATIQUE :

LE DROIT DE RETRAIT DU SALARIE

 

Article L 4131-1 du code du travail en vigueur depuis le 1 mai 2008 dispose que :

"Le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection.

Il peut se retirer d'une telle situation.

L'employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d'une défectuosité du système de protection."


1-      DÉFINITION ET CONTOURS DU DROIT DE RETRAIT

Lorsqu’un salarié se trouve dans une situation de travail dont il a un motif raisonnable ou légitime de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ce salarié dispose du droit de quitter son poste de travail, sans que l’on puisse le sanctionner ( cf art  L. 4131-1 ci-dessus du code du travail).

Il s’agit d’un droit et non d’une obligation ; l'employeur ne peut pas obliger ou même reprocher au salarié de ne pas en avoir fait usage.

Il s’agit d’un droit qui n’est pas soumis à une autorisation préalable : il suffit donc que le salarié constate une situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, pour qu’il puisse exercer le droit de retrait.

Il s’agit d’un droit aussi bien individuel que collectif.


2-      LES MODALITÉS DU DROIT DE RETRAIT

Le signalement : le salarié doit signaler à son employeur toute situation présentant un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Il n’existe aucune formalité particulière quant à ce signalement. Ce n'est qu'après avoir signaler la situation, ou concomitamment, que le salarié peut exercer son droit de retrait.

Ainsi dans une affaire où le règlement intérieur obligeait le salarié à signer une déclaration écrite avant de quitter son poste de travail, la Cour de Cassation a jugé ce règlement illicite en ce qu'il restreignait l’exercice du droit au retrait :

  • « Mais attendu que si les dispositions de l'article L. 231-8 du code du travail font obligation à tout salarié de signaler immédiatement l'existence d'une situation de travail qu'il estime dangereuse, elles ne l'obligent pas à le faire par écrit ;Et attendu que la cour d'appel, qui a relevé que le règlement intérieur impose, outre l'obligation d'information du responsable hiérarchique, une obligation immédiate de consignation par écrit avant retrait signée soit par le salarié, soit par un témoin ou par le supérieur hiérarchique, en a exactement déduit que cette obligation ainsi formalisée était de nature à restreindre l'usage du droit de retrait prévu par ce texte ; que le moyen n'est pas fondé ; » (Cass, soc, 28 mai 2008 n°07-15.744)

Ne pas créer une autre situation de danger : le droit de retrait doit être exercé de telle manière qu'il ne puisse pas créer, pour un autre salarié, une nouvelle situation de risque grave et imminent. « Le droit de retrait est exercé de telle manière qu’elle ne puisse créer pour autrui une nouvelle situation de risque grave et imminent » (article L. 4132-1 du code du travail).


3-      AUCUNE SANCTION NE PEUT ETRE PRONONCÉE EN CAS D'EXERCICE LÉGITIME DU DROIT DE RETRAIT 

Aucune sanction ne peut être prise à l'encontre d'un salarié qui n’a fait qu’user de son droit de retrait dans les conditions légales (art L. 4131-3 du code du travail). Fort logiquement, le licenciement prononcé pour un motif lié à l’exercice légitime du droit de retrait est nul.

Si les conditions du droit de retrait ne sont pas réunies, le salarié s'expose à une retenue sur salaire ou à une sanction disciplinaire, peu important qu'il soit resté à la disposition de l'employeur.


4-      LA NOTION DE "DANGER GRAVE ET IMMINENT"

Quand est-ce que la situation de travail devient une situation de danger grave et imminent ?

La notion de dangerosité est appréciée par le salarié lui-même puisqu’il est le mieux placé pour évaluer, dans l’immédiat, sa situation de travail. Et cette évaluation se réalise en fonction de ses connaissances et de son expérience professionnelle.

A posteriori, les juges rechercheront si, du point de vue de salarié, il existait un motif raisonnable de penser que sa vie et/ou sa santé était menacée par un danger grave et imminent.

Plus précisément, la Cour de cassation exige que les juges du fond recherchent, non pas si la situation de travail était objectivement dangereuse, mais si le salarié justifiait d’un motif raisonnable de croire qu’elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie et sa santé :

  • « qu’en statuant comme elle l’a fait, sans rechercher, si, comme elle y était invitée, le salarié justifiait d’un motif raisonnable de penser que la situation de travail, en l’occurrence un travail de soudure sous pression, présentait un danger grave et imminent pour sa vie et sa santé et nécessitait le respect de règles de sécurité qui n’avaient pas été mises en oeuvre en l’espèce, la cour d’appel a privé sa décision de base légale » (Soc., 28 novembre 2000, pourvoi n° 98-45.048 ; dans le même sens : Soc., 23 mars 2005, pourvoi n° 03-42.412).

L’évaluation de la situation par le salarié est donc personnelle et non objective. Ainsi l’existence d’un rapport ultérieur démontrant l’absence de tout danger est sans incidence sur ce qu’a pu croire le salarié lorsqu’il a exercé son droit de retrait :

  • « Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient, après analyse d'une note adressée à ce salarié le 25 octobre 1999 par l'inspecteur du travail observant notamment qu'un rapport de visite ne révèle aucun danger grave et imminent, qu'aucun des autres incidents antérieurs dont fait état M. X... ne caractérise un danger grave et immédiat ;Qu'en statuant ainsi sans rechercher, (…), si le salarié justifiait d'un motif raisonnable de penser que la situation de travail présentait un danger grave et imminent pour sa vie et sa santé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ; » (Cass. soc., 23 mars 2005, n° 03-42.412).

Le danger auquel prétend échapper le salarié ne doit pas nécessairement être étranger à sa personne :  « la condition d’extériorité du danger n’est pas exigée d’une manière exclusive par les articles susvisés » (Soc., 20 mars 1996, Bull. 1996, V, n° 107 p. 73, pourvoi n° 93-40.111).

En revanche, la seule pénibilité du travail, l'inconfort, une nuisance légère, passagère ne justifient pas l'exercice d’un droit de retrait.


5-      OBLIGATIONS DE L'EMPLOYEUR

En présence d'un danger grave et imminent, le chef d'établissement est tenu de prendre les mesures et de donner les instructions nécessaires pour permettre aux travailleurs d'arrêter leur activité et de se mettre en sécurité en quittant immédiatement le lieu de travail (C. trav., art. L. 4132-5). Cette obligation se traduira en pratique par l'élaboration et la diffusion dans l'établissement de consignes d'évacuation.

L’employeur qui néglige de prendre au sérieux une situation de retrait s’expose lui-même au grave risque de se voir déclarer auteur d’une faute inexcusable au cas où le danger signalé par le salarié se réaliserait.

Le bénéfice de la faute inexcusable est de droit pour le salarié ou les salariés qui seraient victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, alors qu'eux-mêmes ou un membre du CHSCT avaient signalé à l'employeur le risque qui s'est matérialisé (C. trav., art. L. 4131-4).

 

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